Voyage voyage (Du désir d'horizon)

Ce ballet résolument contemporain s’inscrit dans la thématique plus actuelle que jamais de l’immigration. Mais le titre annonce d’emblée le ton donné par Salia Sanou, chorégraphe burkinabé qui s’implique depuis plusieurs années auprès des réfugiés dans différents camps. Le propos n’est jamais misérabiliste. Au contraire, les danseurs portent en eux la douleur de leur histoire, de leur passé qui les ont forcé au déracinement, mais ils sont vivants, désespérément vivants. L’expression « l’énergie du désespoir » prend tout son sens ici. Loin de leurs proches et dans un lieu de passage dans lequel ils vivent en situation précaire, ces hommes et ces femmes s’unissent pour former un groupe qui partage les mêmes rêves et les mêmes espoirs pour un avenir meilleur.

Le décor épuré et l’amoncellement de sommiers, pouvant à la fois représenter les dortoirs des camps et les barreaux d’une prison, permettent aux huit danseurs de donner toute la puissance corporelle nécessaire à la mise en mouvement du texte du Nancy Huston « Limbes » rendant hommage au « Cap du pire » de Beckett. Les errances individuelles des âmes qui se cherchent un avenir parviennent à se regrouper dans un esprit collectif d’entraide pour aller de l’avant.
Les danseurs sont superbes et la proposition chorégraphique très pertinente pour offrir un autre regard sur ces déplacés pour qui l’horizon reste aussi incertain que convoité.
Chorégraphie : Salia Sanou
Avec Valentine Carette, Ousséni Dabaré, Catherine Denecy, Jérôme Kaboré, Mickael Nana, Marius Sawadogo, Elithia Rabenjamina, Soa Ratsifandrihana
Théâtre de Chaillot