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Maux d'amour (Scènes de la vie conjugale)

4h pour 20 ans d’histoire. Le metteur en scène propose de traverser dans la durée et sur le long terme le parcours de ce couple entre amour et déchirement. La force du texte permet au spectateur d’y trouver des résonances. La décontraction laisse rapidement place au malaise étouffant.



Bergman prend d’abord le soin de créer un quotidien, avec ses petites habitudes, ses repères, sa répartition des rôles. « Johan ne s’énerve jamais et parfois ça m’énerve ». La pièce s’ouvre sur un dîner. Mariane et Johan, qui semblent nager dans le bonheur, reçoivent un couple d’amis en pleine séparation (très juste Sandy Boizard). Leur osmose n’en parait que plus douce et paisible. Lorsqu’ils se retrouvent à deux, leur bonheur est palpable. On sent leur complicité malgré leurs caractères opposés. Johan a une personnalité très affirmée et stable (« Je suis intelligent, jeune, brillant, sensible, sexy. Je suis un homme engagé, cultivé, instruit et très sociable… Je suis sportif, je suis un bon mari et un bon fils, je suis un amant fabuleux ») alors que Mariane est en admiration, presque dépendante de son mari (« je suis mariée à Johan et j’ai deux filles. C’est tout ce qui me vient »). Mais c’est comme ça que leur couple fonctionne. Ironie de l’histoire, Mariane est une avocate spécialisée en divorces. Sa rencontre avec Mme Jacobi sonne comme une alarme sourde : « c’est terrible, je sens que…comment dire…je me dessèche, je me racornis ».

Et puis soudain, sans prévenir, c’est la rupture. Johan annonce qu’il fait sa valise et qu’il quitte le domicile conjugal. Tout s’effondre et l’univers du couple semble soudain ne jamais avoir existé.



Le couple, dans son universalité, est questionné. Pour deux personnes qui sont en mouvance, rien n’est définitivement acquis. Par la force de l’habitude, elles restent ensemble. Mariane perd tout ce qui donnait sens à son existence, elle qui se reposait beaucoup sur Johan et qui avait pris l’habitude de vivre dans son ombre, elle doit se réinventer. Alors progressivement les rôles s’inversent et les personnalités se redessinent. Progressivement, Mariane s’assume et acquiert son indépendance. En parallèle, Johan enchaîne les conquêtes et finit par s’en lasser. Et alors que Mariane songe à se remarier pour refaire sa vie, c’est lui qui refuse de signer les papiers du divorce. Après tant de violence et de haine déversées, de cris et de larmes, on a du mal à comprendre comment ces deux-là peuvent encore envisager de partager quoi que ce soit. Mais Mariane reste profondément attachée à Johan, qui est lui-même rassuré par la force tranquille de son ex-femme. Peu à peu, ils se rapprochent et une nouvelle relation voit le jour. Paradoxalement, détachés l’un de l’autre, ils s’accordent une confiance mutuelle. Sans la pression liée à l’être ensemble, ils peuvent enfin se donner l’un à l’autre.

Sur scène, leur couple fonctionne merveilleusement bien, justement parce que les acteurs s’écoutent. Comme le dit le metteur en scène « la vulnérabilité des acteurs ne leur laisse pas d’autre choix que la vérité, puisée dans leur expérience propre ». Les spectateurs sont de part et d’autre de la scène et assistent, sidérés, à ces scènes de la vie conjugale d’une banalité hors norme.


D’Ingmar Bergman

Mise en scène Nicolas Liautard


Avec Anne Cantineau, Fabrice Pierre, Sandy Boizard, Michèle Foucher, Nicolas Liautard, Magali Léris ou Nanou Garcia, Christophe Battarel ou Jean-Yves Broustail ou Nicolas Roncerel.


Théâtre de La Colline


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