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Un boulevard pour Bettencourt



Si le théâtre est le reflet de la société, Bettencourt Boulevard est incontournable. En effet, ça peut paraître surprenant, alors qu’une affaire est encore si fraîche dans nos esprits, de la voir déjà débarquer au théâtre. Qui n’a pas entendu parler de cette Affaire Bettencourt qui a fait tellement de bruit ? Tout commence quand le majordome de la richissime femme d’affaires Liliane Bettencourt rend public des enregistrements révélant des comptes cachés et des relations obscures entre les personnes gravitant autour de l’héritière de la maison L’Oréal, sur fond de procès impliquant le photographe François-Marie Banier, accusé d’abus de faiblesse par la fille de Liliane. Deux hommes politiques se retrouvent mêlés à l’affaire dans le cadre de conflits d’intérêts : d’une part Eric Woerth, qui est alors ministre du budget et trésorier de l’UMP alors que sa femme Florence est gestionnaire de la fortune de Liliane Bettencourt, d’autre part Nicolas Sarkozy qui aurait reçu des sommes importantes pour financer sa campagne. Vous suivez toujours ? Forcément, dès que l’on parle de gros sous, de politique et d’héritage, les médias s’emballent et ne tardent pas à mettre le feu aux poudres. Passer du traitement médiatique à l’écriture théâtrale et à la mise en espace scénique était tout l’enjeu de cette pièce.



De ce point de vue, on comprend aisément le côté théâtral de cette affaire, entre rebondissements, non-dits, personnages cachés et double-jeu. Le terme boulevard n’est d’ailleurs pas sans rappeler les comédies de boulevard dont toute l’affaire semble être issue. Le dramaturge Michel Vinaver l’a bien compris en s’attelant très rapidement à l’écriture de la pièce alors que l’affaire était encore fumante. Son réel plus, c’est de s’intéresser aux racines de Liliane, en faisant débuter la pièce avec le père de Liliane qui fonde L’Oréal et le grand-père rabbin de son gendre, mort à Auschwitz. Le nom de Bettencourt prend ainsi du relief et cela nous explique comment on a pu en arriver là. La pièce chorale rend admirablement l’effet de ruche qui caractérise l’univers de Liliane. Jamais seule, elle est entourée de son personnel, de personnes intéressées et d’amis et l’on comprend que les frontières sont parfois minces et qu’il serait impossible de caractériser avec certitude la nature de ces différentes relations. Les ressorts de l’affaire sont complexes et puisque la pièce s’intéresse au parcours de Liliane avant l’affaire, c’est-à-dire alors même que tout se jouait, on constate qu’au quotidien, tout se fait très naturellement. C’est aussi le bémol de la pièce. Les scènes s’enchaînent de manière très fluide et les décors sont très bien conçus mais on peut décrocher de ce quotidien et de ces bruits de couloirs ainsi exposés dans toute leur banalité. C’est un peu long et surtout très factuel. Si l’on peut reconnaitre une juste transcription des tenants et aboutissants de l’affaire, on peut regretter l’absence de prise de parti et d’analyse faisant de Bettencourt Boulevard une pièce finalement assez neutre. La présence d’un narrateur apporte une dimension comique en prenant justement de la distance et son discours pendant les cinq dernières minutes synthétisant toute l’histoire est finalement le plus captivant.


De Michel Vinaver

Mise en scène Christian Schiaretti


Avec : Francine Bergé, Jérôme Deschamps, Didier Flamand, Clément Morinière, Nathalie Ortega, Gaston Richard, Stéphane Bernard, Juliette Rizoud, Julien Tiphaine, Clément Carabédian, Philippe Dusigne, Christine Gagnieux, Damien Gouy, Clémence Longy, Elisabeth Macocco, Dimitri Mager et Pierre Pietri

Voix (grands-pères) : Bruno Abraham Kremer et Michel Aumont

Théâtre de la Colline

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